Article dans Liberation:
La mobilisation étudiante se cherche un second souffle
VÉRONIQUE SOULÉ
QUOTIDIEN : mardi 4 décembre 2007
Un mois après sa naissance, le mouvement étudiant contre la loi sur l’autonomie des universités (LRU) est à un tournant. Le gouvernement a fait des gestes, débloquant de nouveaux crédits, l’Unef s’est retiré et sur le terrain, la contestation semble marquer le pas.
L’état de la mobilisation. Depuis l’appel de l’Unef à suspendre le mouvement, le 30 novembre, pour répondre aux «avancées importantes» du gouvernement, la contestation étudiante a pratiquement disparu des médias. Comme si d’un coup les blocages avaient cessé et les cours repris. Or, le mouvement tarde à s’éteindre. Une nouvelle journée de manifestation est prévue aujourd’hui. Hier, une trentaine d’universités restaient perturbées - avec tout ou partie des bâtiments bloqués, assemblées générales, cours alternatifs, etc.
Réunie le week-end dernier à Nantes, la coordination étudiante nationale, qui rassemble des délégués élus par les AG, continue de réclamer l’abrogation de la loi Pécresse. Pour elle, le gouvernement a répondu à côté. Mais la «coord», où cohabitent des militants de SUD-étudiant, des JCR (Jeunesses communistes révolutionnaires), de l’UEC (Union des étudiants communistes), etc., s’interroge aussi sur la durée du mouvement. «La difficulté, c’est notre absence des médias, explique Kamel Tafer de SUD. Il y a aussi les partiels qui arrivent en janvier, et pour certains en décembre. Heureusement, dans certaines facs, des enseignants commencent à vouloir discuter pour aménager les examens».
Les divisions étudiantes. A la différence du CPE en 2006, le mouvement a très vite souffert de divisions. Prenant le train en marche, l’Unef a introduit une confusion: le principal syndicat étudiant, qui avait participé aux négociations sur la loi en juillet, ne demandait pas son abrogation. Mais des modifications et des mesures pour améliorer les conditions de vie étudiantes. Pourtant, dans les AG, ses militants votaient souvent pour le blocage.
Forts, eux aussi, de l’expérience du CPE, les étudiants «antibloqueurs», proches de l’UNI (droite universitaire), se sont organisés. Encouragés par la ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Pécresse, ils ont participé aux AG, votant contre les blocages, et exigé la libtre entrée des bâtiments, applaudissant même l’intervention des CRS à Nanterre.
Une suite incertaine. La coordination nationale mise maintenant sur la mobilisation des enseignants chercheurs et des personnels administratifs, inquiets des pouvoirs accrus des présidents d’université et des risques grandissants de précarité. Les lycéens, qui avaient rejoint le mouvement, risquent en revanche de manquer à l’appel: l’UNL et la Fidl se sont dits satisfaits des assurances données lors de leur rencontre samedi avec Valérie Pécresse et son collègue de l’Education, Xavier Darcos, notamment sur la non-sélection à l’entrée de l’université.
Au gouvernement, on estime que le mouvement, animé par les «radicaux», souvent des trotskistes, va s’essouffler de lui-même. La masse des étudiants, raisonnable et consciente des gestes financiers, voudra, elle, reprendre les cours, et réussir ses partiels.